L’aventure touristique

Parcourant le monde parsemé de routes et de chemins croisés, les villes s’endorment sans pleurs ni rêves. Le besoin d’explorer ce monde, privilège jadis accordé aux exclus, vagabonds, militaires, prêtres et scientifiques, parcourt de nouveaux horizons. Lors de l’instauration des congés payés, le tourisme s’est démocratisé en exaltant nos affects. Jouant sur les émotions physiques et cérébrales de la découverte-ouverte, pour ceux et celles qui savent le payer, une certaine normalité joyeuse et bariolée, s’instaure dans les esprits et contrées moyennes-occidentales. Le contact entre les différentes modalités de (sur)vie a ouvert de nouvelles perspectives au sein des catégories populaires les moins privilégiées, ainsi qu’aux régions périphériques les plus lointaines, dites arriérées. Donnant surtout des chances aux femmes qui s’octroient des outils puissants pour se libérer des carcans locaux. Les us et coutumes des villages et régions subissant chaque jour une urbanisation certaine, les vacances pourtant sont devenues des colonies. Nos cerveaux les derniers champs à conquérir, le tourisme industriel nous offre la cerise de sa victoire la plus profonde: la Société Anonyme. Nous voilà réduits à découvrir la même chose partout. Du Guggenheim à Bilbao au Guggenheim à New-York, de la Journée du Voisin, des Roller-Parades aux Plages estivales et de La Nuit Blanche, nous ne sommes servis que des prés-mâchés. Vendus modestement et selon le cas comme art moyen ou populaire, high-art démocratique ou contemporaine nourriture. Ces Nouveaux Colonisateurs et – trices lancèrent un jour ainsi le dernier cri participatif de la modernité: Circulez, il n’y a rien à voir. L’industrie du tourisme est le plus grand employeur de migrants.