Rendement en laid

Bruxelles a maintenant presque tout pour être une vraie ville : un troupeau de vaches éx©ité, une belle plage estivale, la nuit blanche, la journée du voisin, … Une invasion de projets uniformes parcourt ainsi l’Europe. Chacun de ces projets va de pair avec une promotion quasi inconditionnelle des médias. Joli coup du journal Le Soir qui invente un sociologue spécialisé… en contrôle social. Chacun de ces projets est mis en vente par des serpent(e)s en marketing urbain. Trouvant dans chaque ville plusieurs notables, à la recherche d’une image quelque peu innovante surtout pour eux-mêmes, et un petit peu pour la ville.

Bruxelles aaah paradis.

Cette étable, pardon, cette ville jusque-là vivable, devient étalage. Un établissement incontrôlé de promoteurs immobiliers éclairés, de politiciens fidèles et clientélistes, de publicitaires, d’art et de gardiens souriants, aux mains de marchands et de cabaliers spécialisés dans le développement d’une police participative. Ceux et celles qui marquent, même faiblement, leurs réserves sont désormais considérés comme «antis». Un seul mot d’ordre : Küh Muss Sein.

Vaincus par autant de violence de la part des cow-boys, les Indiens du secteur culturel ne réagissent pas. Morts, malades, trop fatigués ou entièrement pris par les salons d’alimentation des crocodiles. Ce journal donne un forum à ce que nos médias ne creusent pas. Beaucoup d’entre eux d’ailleurs sont sponsor d’une belle vache. Un canard comme introduction aux débats de société qui cependant peuvent êtres menés, du moins si les conditions en sont créées. Une source ouverte d’ accumulation accidentelle de savoirs pour la solidarité générale de l’intellect.

Robelco, sponsor principal d’Art on Cows, est un promoteur immobilier qui gère notamment le site de Tour &Taxis. Avec cette initiative, la direction souhaite participer à la vie culturelle de la ville. Les deux gestionnaires de Robelco sont aussi membres du conseil d’administration de Cofinimmo, la plus grande entreprise de gestion immobilière belge. Occupant ces fonctions importantes, pourquoi alors disposer des vaches uniquement le long d’attractions touristiques et là ou il n’y a que des magasins?

En effet, les petites rues molenbeekoises ne figurent pas sur la carte administrative de Bruxelles-Ville. L’action respecte certaines limites, mais pas toutes: Bruxelles est aspergé arbitrairement. Aucun ruminant muet à la place Schuman, rien dans le quartier européen. Pour quelles raisons les Bruxellois ne sont-ils pas envahis de manière égale ?

D’accord, une vache ne fera pas du vélo jusqu’aux abattoirs d’Anderlecht, mais pour sortir de ce parcours imposé, la motivation des cyclistes de Pro-vélo pour faire usage aveugle d’un plan du circuit sponsorisé par Renault, firme plus tôt pro-automobile, demeure un des plus mystérieux suicides de cet été bruxellois.

Notons une autre inégalité de route : les quinze vaches des associations caritatives participant au projet ne se trouvent pas au centre-ville. Trois organisations sont priées de se consoler en recevant un tiers des sommes récoltées par la vente aux enchères des bolides bovides. Deux associations bénéficiaires proviennent des Marolles. Constatons qu’il y existe une charité déjà très bien organisée, les Marolles étant des quartiers sur-stygmatisés et surexploités pour médiatiser toute bonne cause. On dirait qu’il n’y a que là ou vivent les pauvres et où chaque personne qui y vit est un assisté qui a besoin d’aide. Ce qui n’est pas vrai. Le supplément d’action caritative des VIP’s rameutés par Art on Cows est un masque dominant. La vente aux enchères octroie aussi savamment qu’une entreprise immobilière les montants restants aux gentils organisateurs et aux patrons dévotement attelés à la… tache.

Les artistes participants sont divisés en deux catégories : ceux et celles qui sont payés et ceux et celles qui ne le sont pas. Le traitement égal de tous les citoyens ne s’applique vraisemblablement pas à la cuisine interne d’un projet qui, à la lumière du jour, se présente comme démocratique et participatif. L’action Art on Cows dégénère de façon plus complète encore quand après quelques semaines un appel est lancé pour poster plus de gardiens autour de ce nouveau champ urbain.

Le coloriage bariolé, les endroits joyeux dans la ville, bref tout le côté sympathique de l’initiative pittoresque, s’avère parsemé d’uniformes bruns. Une couleur tout à fait (t)unique autour d’un statuaire qui se révèle petit à petit uniforme. (À toi qui ne gouverne que toi-même, rien n’est demandé).

Un jour, le Gouvernement belge acheta le petit jouet des promoteurs pour l’offrir au Roi qui fêtait son anniversaire. Pourquoi une vache pompière, une copie d’une copie qui n’obéit pas aux règles vestimentaires prescrites est –elle offerte? Peut-être que la décision gouvernementale d’héberger la Police Fédérale dans la tour IBM nous offre une piste. Robelco-Cofinimmo se trouvait à la table de négociation et a rempli la commande. Pour une Belgique Créative et Solidaire ? Pauvres bêtes de santé flamboyante, un appel à l’émeu(h)te fut émis par une vache qui quittait le spectacle. Presque toutes les plaquettes où figurent les noms des sponsors (lisez patrons) disparurent en une seule nuit. Un amateur, ou une amatrice de la belle plaquette photographique est allé prendre les images de ces vacances. Nous avons voulu partager l’ escapade, et publions un poster en guise de couverture. Projet artistique d’une qualité pertinente, mettant en exergue la prétendue absence de toute publicité le temps de cette parade.

En direct du Vacherbeidjan,
Fart on Co’s